Aux États-Unis, des chercheurs ont détecté des traces de SARS-CoV-2 chez le cerf. La circulation du virus au sein de plusieurs espèces animales peut favoriser l'émergence de nouveaux variants…
La découverte de Suresh Kuchipudi, chercheur et microbiologiste vétérinaire de la Penn State, partagée par le New York Times la semaine dernière interroge sur la circulation du SARS-CoV-2 chez les animaux. "La circulation du virus dans une population animale soulève toujours la possibilité d’un retour à l’homme", évoquait alors le scientifique dans les colonnes du célèbre journal américain.
De la chauve-souris au pangolin, en passant par le vison et même le lapin, la transmission du SARS-CoV-2 à l'Homme par le biais de l'animala nourri bien des théories depuis le début de la pandémie.
En avril 2021, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) s'était penchée sur la question. Dans un communiqué signé avec l’Organisation Mondiale de la SantéAnimale et le Programme environnemental de l’ONU, la structure affirmait que"les animaux" (et en particulier les animaux sauvages) "sont la source de plus de 70 % de toutes les maladies infectieuses émergentes chez les humains, et nombre d’entre elles sont causées par de nouveaux virus". Ces maladies sont appelées "zoonoses": ce sont des virus, des maladies ou des bactéries qui peuvent être transmis de l'animal à l'Homme et inversement. Le SARS-CoV-2 "est une zoonose", le virus a infecté l’Homme à partir de ce que l’on appelle un "réservoir animal".
Ces zoonoses circulent généralement entre les animaux d'une même espèce. Mais il arrive que ces maladies évoluent génétiquement et parviennent à "franchir les espèces" : "Les récepteurs d’entrée présents sur le pathogène de l'animal et sur celui de l'Homme peuvent être similaires. C’est la raison pour laquelle les animaux infectés par un pathogène peuvent transmettre le virus à l'espèce humaine", explique Jacques Izopet. Le virus va alors "s'adapter" à son hôte et évoluer génétiquement.
Parfois,l'évolution génétique du virus n'est pas suffisante pour que celle-ci puisse se diffuser au sein d'une autre espèce. C'est le cas par exemple de la grippe aviaire, aussi connue sous le nom de virus H5N1 : L’Homme, s’il est en contact avec un oiseau infecté, peut être contaminé. Mais l’homme infecté ne transmettra pas le virus à un autre homme.
Outre sa transmission à l'Homme, l'apparition de nouveaux variants, lorsque le virus circule au sein de plusieurs espèces, pose question. Cette circulation "offre plus d’opportunités au virus d’évoluer vers de nouveauxvariants", estime Suresh Kuchipudi, dans les colonnes du New YorkTimes. Le scientifique craint ainsi l'apparition progressive d'un variant qui aurait la capacité de résister aux vaccins aujourd'hui en circulation. "Quand le virus se propage, il va créer de nouveaux variants. Seuls les variants les plus adaptés vont perdurer", complète le professeur Izopet, qui affirme que le phénomène est "connu depuis bien longtemps par les scientifiques".
Le virologue estime que le phénomène n'est pas "inquiétant" et insiste sur la nécessité d'étudier " l’ensemble des animaux qui sont infectés par des virus, et notamment par les coronavirus" : "Cela permettrait d’analyser le risque d'émergences de nouvelles formes des différents virus connus aujourd'hui."
L’IA pourrait être le dispositif capable de prédire le prochain virus capable de se transmettre de l’animal à l’homme. Le travail des chercheurs britanniques de l’Université de Glasgow récemment publié, le confirme.
Mais comment fonctionnerait ce dispositif ? Les Prs Nardus Mollentze, Simon Babayan et Daniel Streicker, nous éclairent sur ce point. "Nous avons mis au point une machine capable de reconnaître des génomes viraux et d’estimer la probabilité qu’un animal infecté puisse transmettre ce virus àl’Homme ", détaillent-ils. Un travail d’identification délicat étant donné que "seule une toute petite minorité des 1,67 million de virus animaliers sont capables d’être transmis à l’Homme ".
Pour mettre au point ce dispositif, les scientifiques ont sélectionné 861 espèces virales issues de 36 familles différentes. Ils ont ensuite mis au point une machine sur laquelle ils ont associé chaque espèce à un risque de contamination de l’animal à l’homme. Cette même machine pouvait identifier les virus de zoonoses capables d’utiliser leur génome viral pour se propager chez l’Homme.
A terme, cette méthode pourrait aider à la surveillance et à l’anticipation des mesures préventives, notamment la mise au point de vaccins efficients, pour freiner la propagation de potentiels virus à zoonoses." Reste qu’il ne s’agit que du modèle informatique ", tempèrent les scientifiques. Et cette machine, si elle est capable d’identifier les virus à risque pour l’Homme, " ne prend pas en compte tous les paramètres inhérents à la propagation virale. La virulence chez l’être humain n’est ainsi pas évaluée avec notre machine. " Idem concernant " la propension du virus à se propager et les conditions environnementales pouvant influer sur le degré de contagion ".
En somme, " la machine d’IA constitue un premier pas dans la surveillance épidémique des zoonoses. Mais à ce jour, elle ne peut suffire à évaluer précisément l’impact d’une potentielle zoonose contractée de l’animal jusqu’à l’Homme. "
Source : https://www.ladepeche.fr/2022/02/13/covid-19-aux-etats-unis-des-cerfs-contamines-par-omicron-pourraient-etre-a-lorigine-dun-nouveau-variant-10108136.php
Alors que la baisse de la circulation du virus ralentit, les scientifiques et les autorités s'attendent à une huitième vague de l'épidémie à l'automne. Elles appellent à accélérer les efforts de vaccination.
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